Alep

Il était une ville. 
Une ville oubliée, 
Sous des tapis de bombes. 
 
Tapis qu'on ne soulève que pour mieux camoufler, 
Saleté, lâcheté et les amas de haine. 
 
Frappes chirurgicales sur les hôpitaux morts ! 
Morts du feu déversé sous nos yeux inutiles. 
Nos yeux fermés regardant incrédules, 
Nos nombrils étonnés, nos nombrils aveuglés. 
 
Ces yeux pas même honteux de compter les cercueils. 
Tandis que là bas à La Haye, on se prend à juger 
Les restes inhumains 
De personnages funestes dont je tairai le nom. 
Le nom encore inscrit, tatoué sur les fronts 
Meurtris de ceux qui gisent allongés dans le froid 
implorant patiemment justice pour leur âme. 
 
25 années déjà. 
 
Tandis qu'on juge le passé, on laisse vilement 
D'autres bouchers bourreaux agir plus à l'Est. 
Et les diplomates comptent, 
Ils comptent et tergiversent, 
Quand en fait ils apprêtent 
Le terreau noir et lourd, 
Grouillant et satisfait 
Des haines, des vengeances 
Et des morts de demain. 
 
Cette ville évoquait les parfums, 
Des pins et des savons soyeux. 
 
Noircie et écrasée, 
Humiliée et violée. 
Par les hommes qui font et par ceux qui se taisent. 
 
Elle ne sera plus désormais 
Que ce vil acronyme 
Avilie 
    Lapidée 
       Ecrasée 
           Pulvérisée

© Eric Benoit